Homélie du mardi 17 novembre 2020

18 Nov 2020 | Homélies

Père Gilles Rousselet

Apocalypse st Jean 3, 1-6 14-22 ; Ps 14 ; Evangile st Luc 19, 1-10

Ce récit de la première lecture que nous venons d’entendre est bouleversant comme celui de l’Apocalypse – qui veut dire « révélation »- Beaucoup de choses sont révélées, tout d’abord ce n’est pas « pour rire » que Jésus nous a aimés… Il y a vraiment une urgence, il est question d’être brûlant ou glacé, mais pas tiède… ça nous montre que l’Esprit Saint est continuellement à l’œuvre dans notre vie pour éclairer notre conscience. Jésus dit « Faites attention à la manière dont vous écoutez ». Comment nous mettons-nous à l’écoute de l’Esprit Saint qui parle ? Le livre sur lequel l’Esprit Saint écrit, c’est notre vie, ce sont les événements. Dans la Bible,’ parole’ et ‘événement’ c’est le même mot. Être bien à l’écoute, dans les événements, de ce que l’Esprit Saint nous dit en se rappelant que ce qui est premier, c’est l’Amour, comme nous le dit le livre de l’Apocalypse ; ce n’est pas le péché qui est premier, c’est l’Amour ; d’ailleurs il n’y a pas vraiment de péché si ce n’est en référence avec l’Amour. Cet Amour est un amour exigeant, c’est pour cela que je rappelais cette parole de Jésus à Sainte Brigitte : « Ce n’est pas pour rire que je t’ai aimée ». Ne remets pas à demain ce que tu dois faire aujourd’hui, et en particulier cette invitation pressante à ta conversion, qui n’est pas à prendre sur le plan moral, mais sur le plan de la joie… 

C’est ce que nous approfondissons dans l’Évangile, et c’est juste la suite de l’épisode avec Bartimée à Jéricho – qui est la ville la plus basse, Jésus continue de descendre avant de monter sur le Golgotha, c’est encore une rencontre qui s’éclaire d’une manière particulière par la croix.

Il s’agit d’un homme qui est aveugle, autant que Bartimée hier, Zachée est aveugle, il ne peut pas voir Jésus… et la foule fait obstacle dans un certain sens ; hier elle empêchait Bartimée de voir Jésus parce qu’il faisait beaucoup de bruit, il empêchait la sérénité « apparente » ; aujourd’hui la foule fait vraiment obstacle et on voit comment les interventions de Jésus vont révéler les pensées secrètes de beaucoup…. Ici ils récriminaient. Le vieillard Siméon l’avait prophétisé : « Les pensées secrètes de beaucoup seront révélées » et c’est le cas ici. Cette foule fait obstacle, car Zachée est pécheur, il est du côté des collaborateurs, il est rejeté de tous. Alors Zachée monte sur son sycomore et c’est un bel acte. Comme Bartimée qui ne craint pas le ridicule et crie : « Jésus, fils de David prends pitié de moi ! » Zachée, de petite taille, monte sur son arbre, il n’a pas peur du ridicule non plus. Saint Jean-Paul II disait que le personnage de Zachée est intéressant. On en rencontre souvent dans les confessionnaux ; la raison pour laquelle il monte sur son arbre, c’est qu’il est curieux… St Jean-Paul II dit que si le fils prodigue revient vers son père, c’est qu’il a faim. L’élan qui pousse les personnes à se tourner vers le Père n’est pas forcément d’une grande profondeur. Il disait toujours aux prêtres, « Sachez toujours accueillir ces demandes là sans les juger car elles viennent de moi ». C’est justement ce que révèle ce récit : c’est Jésus qui traverse Jéricho, et comme Zachée est monté sur son arbre, il lève les yeux, au milieu de cette foule qui ne cherchait qu’à attirer son attention sur autre chose : « Zachée, descends de ton arbre, il faut que j’aille demeurer chez toi ». On voit ici ce que Jésus s’apprête à faire dans sa passion, « Il fallait que je manifeste de cette façon-là l’Amour de Dieu pour vous », dont le fruit est de demeurer chez vous. Quand Jésus s’en va, il dit « Je reviens vers vous, je demeure en vous ». Il demeure en nous par les sacrements. Cela a une fécondité qui doit nous servir de critère de discernement. Dans quelle mesure avons-nous vraiment accueilli la miséricorde de Dieu dans notre vie, par le pardon, dont Jésus est à l’initiative ? C’est le fruit de sa mort et de sa résurrection. D’abord il y a cette vitesse ! Parfois nous allons au confessionnal en traînant les pieds, je ne parle pas de douleurs articulaires, non, c’est plutôt « Je n’ai pas envie ». Zachée, lui, descend de son arbre, très vite et il va accueillir Jésus chez lui. Un autre fruit c’est la Joie ! Cela me rappelle une petite fille dont les parents disaient qu’elle n’était pas tout à fait prête pour la confession, et moi quand je l’ai reçue, j’ai vu une petite fille tellement excitée à l’idée de se confesser, ses jambes gesticulaient dans l’empressement de pouvoir se confesser et d’accueillir la miséricorde de Dieu. Quand elle est sortie du confessionnal, elle rayonnait de joie. Zachée aussi rayonnait de joie…une joie qui est contagieuse ! Un autre aspect qui paraît excessif, il dit « Je vais donner la moitié de mes biens aux pauvres et si j’ai volé quelqu’un je vais lui rendre quatre fois plus ». Si tous les pénitents en arrivaient là, c’est sûr que ça changerait les caisses de la paroisse ! En tous cas, ce que cela manifeste c’est un changement radical de vie ; ce n’est pas son attitude qui va augmenter la grâce de la miséricorde de Dieu qui est absolue, pleinement réalisée, pleinement accomplie quand Jésus remet son esprit entre les mains du Père en disant « Pardonne leur, ils ne savent pas ce qu’ils font »… Zachée manifeste qu’il veut changer de vie, et ce changement de vie va permettre à la miséricorde de Dieu de se répandre dans sa vie et d’être contagieuse ; dans ce témoignage-là, on va donner envie à d’autres pécheurs, c’est-à-dire nous tous, d’aller recevoir la miséricorde de Dieu. Les fruits sont donc la joie, l’empressement… – vous savez que nous faisons ici des permanences pour que vous puissiez venir vous confesser et recevoir l’Eucharistie… Je suis alors dans la grâce, je ne regarde pas mon nombril, mon péché, mais l’amour dont je suis aimé et cette grâce quand je l’ai reçue, peut changer ma vie. Cela peut être un changement radical, cela arrive. Certains saints se sont convertis instantanément dans le confessionnal et d’autres – ce peut être notre cas à tous – petit à petit ça se réalise… mais il ne faut pas que les rencontres avec le Seigneur dans sa miséricorde soient trop espacées, c’est la raison pour laquelle l’Église invite à la confession mensuelle. C’est parce que l’on a besoin de renouveler régulièrement cette grâce, cette démarche de notre part pour pouvoir entendre Jésus nous dire « Il faut que je vienne demeurer chez toi, parce que sans moi tu ne peux pas vivre, tu ne t’en rends même pas compte, mais tu ne peux pas vivre. »              

Amen